Violences sexuelles dans la communauté juive: une lettre ouverte brise l'omerta

i24NEWS

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Un homme marche dans le quartier ultra orthodoxe de Mea Sharim, à Jérusalem, le 16 mars 2020.
Yonatan Sindel/Flash90Un homme marche dans le quartier ultra orthodoxe de Mea Sharim, à Jérusalem, le 16 mars 2020.

"Nous découvrons de nouveaux cas de rabbins exerçant encore en France et soupçonnés ou accusés d'agressions"

« Quand la communauté juive est la proie de rabbins prédateurs. Abus sexuels sous silence ». Une lettre ouverte au titre explicite, publiée mercredi et signée par cinq figures de la communauté juive francophone, lance un signal d’alarme alors que les scandales sexuels se succèdent en France comme en Israël. Le groupe, intitulé « Nous pour elles » appelle à la création d’une instance française dédiée.

Le groupe, composé de Janine Elkouby, ancienne vice-présidente du CIBR et présidente AJCF Strasbourg, Hannah Ruimy, responsable pédagogique et enseignante, Sarah Bloch-Elkouby, docteur en psychologie clinique, Michael Blum, journaliste, et l'avocat Emmanuel Bloch, cherche à interroger "les réelles dimensions de l’abus au sein des institutions juives françaises, consistoriales et non-consistoriales".

« Nous tendons une main aux victimes qui ont besoin de savoir qu'on les croit afin de mettre fin à cette forme d'omerta dans les milieux religieux », a confié M. Blum à i24NEWS. « Nos mains tendues étaient visiblement attendues… On découvre des histoires anciennes, d'autres plus récentes et nous découvrons avec effroi de nouveaux cas de rabbins exerçant encore en France et soupçonnés ou accusés d'agressions sexuelles, en plus de l'affaire qui a déclenché notre engagement ».

Les témoignages recueillis ne représentent sans doute que la partie émergée de l’iceberg. D’autres victimes, juives ou non-juives, existent probablement par ailleurs, quand bien même nous ne connaissons ni leur nombre ni leurs noms, indique la lettre ouverte. « La peur du scandale, la honte d’autant plus fortement ressentie dans un milieu religieux, la peur d’être mis au ban, le fait que ces communautés fonctionnent de manière opaque, tout cela peut expliquer que des scandales soient aussi longtemps étouffés et que des rabbins criminels puissent continuer à exercer », reprend le journaliste.

La lettre ouverte pointe également du doigt le silence des institutions, qui continueraient à laisser exercer des individus accusés ou condamnés. Parmi les exemples cités dans la missive, « un rabbin condamné pour agression sexuelle à deux ans de prison avec sursis, et interdit d’activité professionnelle pour une durée de dix ans, continue aujourd’hui d’exercer à Marseille, avec la bénédiction du Consistoire ». 

Le consistoire Israélite de Marseille s'insurge et dément pour sa part une quelconque omerta et tout soutien à un homme ayant commis des faits aussi graves. 

"Il n'y a aucune bénédiction consistoriale dans cette affaire, bien au contraire, le grand rabbin de Marseille met régulièrement notre communauté en garde sur les démarches religieuses et les actions rabbiniques entreprises par cet homme, sur le fait qu'elles ne sont pas et ne seront jamais reconnues par le grand rabbinat. Nous ne sommes ni la justice ni la police, et nous ne pouvons pas l'empêcher d'avoir un petit groupe de fidèles", a réagi le consistoire.

Le collectif a trouvé écho en Israël puisqu'il a reçu le soutien du grand rabbin de Safed, connu notamment pour avoir dénoncé une immense figure israélienne, Yehuda Meshi Zahav, qui s’est suicidé après que de nombreuses femmes aient décidé de briser l’omerta qui, depuis des dizaines et des dizaines d’années, le protégeaient. Chemouel Eliahou avait également alerté sur l’affaire Chaïm Walder, le célèbre auteur haredi pour enfants. Les deux affaires avaient fortement secoué le monde ultra-orthodoxe israélien en 2021.

 

 

 

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