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Les tunnels: l’arme secrète du Hezbollah pour attaquer la Galilée (analyse)


La découverte par l'armée israélienne (Tsahal) des tunnels souterrains du Hezbollah qui relient le Liban au nord d’Israël est un événement bouleversant mais pas isolé puisqu’il s’inscrit dans une guerre de l’ombre à plus grande échelle.
Dans la course à l'armement à laquelle se livrent l'Etat hébreu et ses adversaires, chaque camp tente d’augmenter ses capacités contre l’autre et de se positionner au mieux en prévision du jour où une guerre généralisée éclatera.
Dans cette compétition, Israël compte sur ses renseignements de pointe pour surveiller la région dans son ensemble et contrecarrer les plans de l’axe Iran-Hezbollah.
C’est dans ce cadre que la technologie israélienne avait révélé les tunnels souterrains du Hamas creusés depuis la bande de Gaza. Tsahal a ainsi pu les découvrir et les détruire un à un, et utilisé cette même technologie pour mettre à jour les tunnels libanais.
Cela faisait plusieurs années que les forces de défense israéliennes observaient le Hezbollah creuser des galeries souterraines et elles attendaient le bon moment pour étouffer la menace dans l’œuf.
Le début de l'opération Bouclier du Nord qui s’annonce d’ores et déjà longue et consiste à exposer cette menace constitue une perturbation majeure dans les plans du Hezbollah qui s’était fixé pour but de « conquérir » la Galilée. Une menace que l’organisation et son chef, Hassan Nasrallah, n’a eu de cesse de réitérer au cours de ces dernières années dans ses messages de propagande.
L’unité Redouane du groupe chiite, forte de son expérience solide acquise sur le terrain lors de la guerre en Syrie, a appris à attaquer les territoires de son adversaire et à utiliser la puissance du feu en renfort.
En cas de guerre, ces forces spéciales du Hezbollah utiliseraient ces nouvelles aptitudes dans le cadre d’un conflit avec Israël. Si les tunnels n’avaient pas été découverts, les cellules terroristes Redouane auraient aisément pu se frayer un chemin sous terre sans craindre les défenses à la frontière israélo-libanaise (comprenant notamment un arsenal de capteurs, une barrière et des falaises artificielles) et s'infiltrer dans le nord de l'Etat hébreu.
En progressant en Israël, l’arsenal de roquettes et d’obus de mortier du Hezbollah aurait fourni aux membres de l’organisation terroriste des tirs de couverture.
Une fois en Israël, ils auraient pu pénétrer dans les villages situés à la frontière, assassiner et kidnapper des soldats et des civils israéliens et planter le drapeau jaune du Hezbollah dans l’un de ces villages. De cette opération serait sortie une photo de propagande de victoire dont les dirigeants du Hezbollah se seraient servis pour démoraliser Israël.
Mais l’opération de Tsahal couronnée de succès a stoppé net ces projets que l’Iran a financés et pour lesquels elle a mis à profit tout son savoir-faire.
L’opération de destruction de ces tunnels met également en valeur la coopération qui existe entre les ennemis d’Israël: en effet, le Hamas a partagé avec le Hezbollah son expérience dans la construction de tunnels mais les faits et gestes du mouvement libanais - à l’instar de ceux de l’organisation palestinienne - n’ont pas échappé aux services de renseignements israéliens.
Les services secrets et technologiques israéliens - composés du Commandement du nord de Tsahal, du Corps du génie de combat, de la direction du renseignement militaire et du ministère de la Défense - ont préféré ne pas agir tout de suite et attendre patiemment le moment opportun pour intervenir. Ils ont gardé l’affaire confidentielle jusqu’au bout, tout comme le Hezbollah.
Dans un avenir proche, le risque d’une escalade demeure puisque le Hezbollah pourrait retourner la situation et empêcher Israël de détruire ses tunnels.
Cependant, une telle action serait une grave erreur de calcul et pourrait provoquer une réponse militaire israélienne violente. C’est du moins ce que les forces militaires envoyées en renfort à la frontière libanaise ont fait comprendre au Hezbollah.
On s’attend donc à ce que le groupe chiite cherche d’autres moyens de garder la face, notamment dans ses discours et son attitude. Le Hezbollah est dans une situation délicate : le Liban se trouve menacé par ses militants et, par ailleurs, la communauté internationale possède des preuves irréfutables que l’Iran finance l’organisation en plus de violer la résolution 1701 des Nations unies qui expulse le groupe du Sud du Liban.
En territoire libanais, le Hezbollah appuyé par l'Iran continue de jouer avec le feu en construisant des usines de missiles dans des installations souterraines, installations qu’Israël ne tolérera pas.
Alors qu’aucun des deux camps ne veut la guerre, les dangereuses activités du Hezbollah (et de l’Iran) déstabilisent la région et pourraient provoquer une action préventive plus développée de la part d’Israël avec des conséquences imprévisibles.
Yaakov Lappin est chercheur au Centre d'études stratégiques Begin-Sadate, et correspondant pour le Jane's Defence Weekly